Contemporain

Brooklyn • Colm Tóibín

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J’ai acheté ce roman lorsque il a été réédité avec la jolie couverture tirée du film éponyme. Pourtant, il est resté à prendre la poussière dans ma bibliothèque. Un grand merci à Stéphanie du blog SorbetKiwi qui m’a accompagnée dans cette lecture.

Résumé-01

Enniscorthy, sud-est de l’Irlande, années 1950. Comme de nombreux jeunes de sa génération, Eilis Lacey, diplôme de comptabilité en poche, ne parvient pas à trouver du travail. Par l’entremise d’un prêtre, sa sœur Rose obtient pour elle un emploi aux États-Unis. En poussant sa jeune sœur à partir, Rose se sacrifie : elle sera seule désormais pour s’occuper de leur mère veuve et aura peu de chance de se marier. Terrorisée à l’idée de quitter le cocon familial, mais contrainte de se plier à la décision de Rose, Eilis quitte l’Irlande. À Brooklyn, elle loue une chambre dans une pension de famille irlandaise et commence son existence américaine sous la surveillance insistante de la logeuse et des autres locataires.

Ce que j'en pense-01

L’immigration irlandaise aux Etats-Unis a été très importante au cours du XIXe et XXe siècle, pour des raisons de famine, économiques ou politiques. Eilis Lacey, bien que personnage de fiction, est une voix qui retrace le parcours de nombreux irlandais et irlandaises qui ont quitté leurs terres pour rejoindre l’Amérique, dans le but de trouver un meilleur travail, des conditions de vies améliorées. Alors qu’elle a étudié la comptabilité, elle peine à trouver un emploi dans la petite ville d’Enniscorthy. Avec l’aide de sa sœur Rose, elle va être envoyé à Brooklyn. C’est une grande aventure qui démarre pour elle et va l’amener sans cesse à faire des choix, éprouver la distance et le manque de son chez-elle.

Jusqu’à présent, Eilis avait toujours cru qu’elle vivrait toute sa vie, comme sa mère avant elle, dans cette ville où elle était connue de tous ; elle avait cru qu’elle garderait toute sa vie les mêmes amis, les mêmes voisins, les mêmes habitudes, les mêmes itinéraires. Elle avait imaginé qu’elle trouverait un emploi en ville et que, par la suite, elle épouserait quelqu’un et laisserait son travail pour élever ses enfants.

Pourtant, les Etats-Unis lui offrent une certaine indépendance qu’elle n’a jamais connue en Irlande. Sa chambre à la pension de Mme Kehoe, son emploi de vendeuse chez Bartocci’s, ses cours du soir de comptabilité au Brooklyn College, sa relation avec Tony, un gentil et attentionné italien. Sa vie se construit tandis qu’elle surmonte le mal du pays qui la rongeait les premiers temps de son arrivée. Eilis est une jeune femme qui m’est souvent apparue comme fragile, d’une sensibilité et d’une douceur extrême, d’une innocence touchante. Elle se laisse bien souvent guidée par les choix des autres, sans jamais exprimer à haute voix ses propres pensées. Là où elle pourrait sembler ennuyante, elle n’en est que plus attachante.

Lorsqu’un bouleversement la contraint à un retour en Irlande, c’est une nouvelle Eilis qu’on découvre. Tiraillée par les choix, les sacrifices, par le sentiment d’être coupée en deux. Eilis n’est plus irlandaise mais elle ne sent pas non plus américaine. C’est toute la question de l’identité à travers l’immigration qui est abordée et comment elle gère cette nationalité qui la divise. Autour de la vie d’Eilis, on voit se dessiner les années 50 et le monde du travail, le choc des cultures avec les immigrations massives, la place des personnes Noires dans la société et leur reconnaissance, les conséquences de la guerre sur l’Irlande.

Elle laissait filer ces images le plus vite possible, en s’arrêtant dès que celles-ci effleuraient la vraie peur, le véritable effroi ou, pire encore, la notion qu’elle s’apprêtait à perdre ce monde à jamais, qu’elle ne vivrait plus jamais une journée ordinaire dans ce lieu ordinaire, que le reste de sa vie serait désormais une lutte contre l’inconnu.

Si son caractère très passif entraîne une lenteur au niveau du récit qui m’a, au départ, beaucoup surprise, je me suis rapidement prise de curiosité pour les nombreuses descriptions et détails que l’auteur apporte. L’écriture en est, de ce fait, très visuelle. Ce roman est riche, très dense et montre à quel point cette nouvelle vie pour Eilis est autant source d’expériences sociales et professionnelles que de questionnements et de renoncements.

Séprateur-01

Tout quitter pour recommencer ailleurs, sur une terre plus propice à l’épanouissement professionnel : Eilis est sommée de quitter l’Irlande pour immigrer aux Etats-Unis, où les perspectives professionnelles sont meilleures. Brooklyn est un très beau roman sur l’immigration et le sentiment de division qu’il provoque, sur les années 50 et ses bouleversements.

Très bonne lecture-01

7 commentaires sur “Brooklyn • Colm Tóibín

  1. Merci à toi de m’avoir accompagné durant cette lecture, qui est vraiment intéressante et hyper touchante ❤ Les deux citations que tu as choisi reflètent parfaitement ce tiraillement que ressent Eilis. Le Sujet est vraiment interessant, je n'ai pas lu beaucoup de livres qui traitent de cette problématique, donc je suis très contente d'avoir pu partager ca Avec toi 🙂

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  2. Une super lecture pour moi aussi ! 😉 A la sortie du roman, j’avais lu de très bons avis. Ensuite, j’ai eu l’occasion aussi de lire des ressentis plus mitigés mais je ne me suis pas laissée influencer et j’ai trouvé que ce roman était très beau, bien écrit. J’ai aimé le personnage d’Eilis, je me suis identifiée à elle, je l’ai comprise et elle m’a touchée.
    Une chouette lecture qui permet d’en apprendre un peu plus sur l’immigration irlandaise aux Etats-Unis, sur le déracinement en général et qui m’a parfois monter les larmes aux yeux. Colm Toibin est un auteur très talentueux…

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    1. C’est vrai que ça explore vraiment bien la thématique de l’immigration irlandaise. J’ai vu le film juste après et les deux sont très complémentaires. Ce sont deux très belles œuvres 🙂

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