Sous les branches de l’udala • Chinelo Okparanta

C’est particulièrement la rentrée littéraire étrangère qui m’a attirée cette année et parmi les nombreuses parutions, Sous les branches de l’udala était véritablement le roman que je souhaitais découvrir, pour les thématiques fortes qu’il aborde.

Ijeoma a onze ans lorsque la guerre civile éclate au cœur de la jeune république du Nigeria. Son père est mort et sa mère, aussi abattue qu’impuissante, lui demande de partir quelques temps et d’aller vivre à Nweni, un village voisin. Hébergée par un professeur de grammaire et son épouse, Ijeoma rencontre Amina, une jeune orpheline. Et les fillettes tombent amoureuses. Tout simplement.Mais au Biafra, dans les années 1970, l’homosexualité est un crime. Commence alors le long et douloureux combat d’Ijeoma pour réussir à vivre ses désirs et, surtout, à comprendre qui elle est : il y aura la haine de soi, les efforts pour faire ce que l’on attend d’elle, et, enfin, la puissance des sentiments, envers et contre tous…

De 1968 à 2014, l’histoire qui se tisse est celle d’Ijeoma, une jeune nigériane. Alors que la guerre éclate dans son pays, entre le Nigéria et la république du Biafra, elle est contrainte de devoir quitter Ojoto, petit village où elle habite. Après la mort de son père, sa mère va l’envoyer vivre chez un professeur à Nnewi, au sud du pays, croyant la mettre en sécurité. Là-bas, elle va rencontrer Amina. Une jeune fille qui va bouleverser sa vie et son quotidien et pour laquelle elle va éprouver des sentiments amoureux. Autrement dit, des sentiments immoraux aux yeux de la religion et des nigérians.

Dans ce contexte de guerre civile, elle va grandir avec le poids de son secret terrible, de son fardeau : son homosexualité. Condamnée par le Nigéria, les pratiques homosexuelles sont durement récriminées. Lapidation, noyade, assassinant, peines de prison. Nombreuses sont les personnes à payer le prix fort de leurs sentiments. Si des lieux privés et tenus secrets s’ouvrent pour tenir lieu de rassemblement, c’est souvent à durée éphémère puisqu’ils sont souvent rapidement découverts et sont sujets à des descentes particulièrement violentes.

Au fil de sa vie, Ijeoma sera forcée de se marier pour camoufler son attirance pour les femmes, pour « rentrer dans le droit chemin ». Une vie cachée, un bonheur avorté malgré ses sentiments. La narration est telle qu’on est véritablement plongée dans les pensées de la jeune femme, des pensées qui sont de l’ordre de l’intime, de la confession. Elle donne à voir les conditions de vie, la société dans laquelle elle vit et ses évolutions. C’est tout un cheminement qui la traverse, à mesure qu’elle devient une adulte et une mère.

A plusieurs reprises pendant ma lecture, j’ai été partagée entre le dégoût, la colère, la surprise. Le poids des traditions et de la religion demeure le principal sujet du récit, même si on prend également conscience des luttes qui coexistent au Nigéria, notamment la lutte pour les droits des hommes et des femmes, une lutte interethnique, etc. Ce roman est particulièrement enrichissant, c’est une voix puissante qui se lève contre les pratiques d’un pays contre l’homosexualité. C’est aussi une voix qui tente de donner légitimité aux personnes homosexuelles, qui incite à contribuer au respect de leurs droits. Le droit d’aimer la personne de son choix, de vivre avec elle.

Sous les branches de l’udala est un roman très puissant et enrichissant. Explorant l’histoire d’un pays durant près de 50 ans à travers la vie d’Ijeoma, une jeune nigériane homosexuelle, ce roman vient pointer du doigt une société très religieuse et traditionnelle, qui peine à se remettre des guerres civiles et conflits interethniques du siècle dernier.

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