Historique·Saga historique & familiale

La passeuse d’histoires • Sejal Badani

Depuis sa sortie en 2020, ce roman fait partie de ma pile à lire et je savais d’avance qu’il viendrait me bouleverser. Après deux ans, et sur les conseils d’amies blogueuses, il est enfin lu et il ne sera jamais oublié.

Jaya, une journaliste new-yorkaise, bouleversée par une troisième fausse couche et le délitement de son mariage, embarque dans un inoubliable voyage en Inde à la recherche de son histoire familiale troublée. Émerveillée par ce qu’elle y découvre, Jaya apprend tout ce qu’elle peut sur la culture du pays. C’est en rencontrant Ravi, ancien servant et confident de sa grand-mère Amisha, qu’elle va en apprendre plus sur son histoire familiale. Le vieil homme lui racontera la vie d’Amisha sous l’occupation britannique, de son mariage arrangé à son histoire d’amour impossible avec un lieutenant britannique. Il lui parlera également de l’école anglaise où, malgré les interdits de l’époque, elle enseignait l’écriture, elle qui adorait raconter et écrire des histoires pour ses enfants… À travers l’histoire déchirante de sa grand-mère, modèle de résilience, Jaya se découvre une force que, jusque-là, elle n’avait jamais soupçonnée.

Entre passé et présent

Il y a, dans la façon de traiter le sujet profond de ce roman, une humanité qui bouleverse dès les premiers chapitres. Jaya est une jeune femme en souffrance, après l’échec de nombreuses FIV et des fausses couches qui la laissent anéantie. Tandis que son mariage vacille douloureusement sous le coup de ce destin qui la blesse, elle va partir pour l’Inde et rejoindre la terre de ses ancêtres, sur les traces de son histoire familiale que sa mère lui cache depuis tant d’années et dans laquelle elle espère trouver le deuil de sa maternité avortée. Sur place, elle rencontre Ravi, un homme de la caste des Intouchables mais également fidèle serviteur d’Amisha, la grand-mère de Jaya, décédée très récemment et détentrice des secrets qui entourent toute le passé de sa famille.

Dans ma tête, l’histoire d’Amisha et la mienne se mêlent. Tous ces choix qu’elle n’a pas pu faire, toute la liberté dont j’ai disposé… Tous les chagrins qui l’ont secouée, tous ceux que j’ai fait mine d’ignorer… La femme admirable qu’elle était, celle que je ne suis pas… 

Une plongée dans l’Inde sous colonisation britannique

L’autrice nous immerge dans un récit polyphonique qui alterne le passé et le présent et au cœur duquel Jaya va plonger dans son histoire familiale, découvrir la vie d’Amisha. Loyale, honnête et dévouée à son mari, elle va encaisser des années de souffrances auprès de sa belle-famille avant d’affirmer son besoin d’être, malgré les règles traditionnelles de la société indienne et la place imposée de la femme au sein du foyer. Passionnée d’écriture et très créative, elle va réussir à occuper un poste d’enseignante au sein de l’école construire dans son village par les Britanniques et sa rencontre avec un officier va bouleverser son destin et sa vie. Le contexte de domination britannique au sein d’un pays en passe d’indépendance est décrit avec une telle finesse qu’on découvre subtilement à quel point les deux modes de vie se sont entrechoqués. Les détails historiques sont précis et permettent de s’immerger complètement dans cette époque.

L’humanité s’égare sur cette terre. A cause de la folie, la connaissance est obscurcie. Mais pour ceux dont la noirceur de l’âme est chassée par la lumière, des lueurs splendides et nettes manifestent la vérité. Comme si un soleil de sagesse se levait pour laisser ses rayons de l’aube.

Des héroïnes fortes, courageuses et libres

Si l’histoire d’Amisha est un exemple d’affirmation féminine incroyable vis-à-vis des principes d’éducation traditionnels, et malgré le côté tragique de sa vie, on ne peut cependant pas mettre de côté Jaya et ses souffrances, sa faculté de rebondir et de se reconstruire au milieu de son héritage familial. Ce sont deux personnages très forts, mis au centre du récit par leur courage, leur beauté et leur engagement à être des femmes libres, régies par leurs propres passions et non la domination masculine. La passeuse d’histoires est un roman merveilleux, dépaysant et d’une extrême beauté, sur le pardon, l’amour, la résilience et l’acceptation, le destin mais aussi la famille et la transmission. C’est une invitation au voyage, dans ce pays si contrasté et dans cette culture si différente.

Chaque jour est précieux et l’amour doit être protégé comme un trésor inestimable, accordé seulement aux plus chanceux. 

Et si les traditions n’étaient que des excuses pour ne pas changer les choses ?

Coup de cœur pour ce roman d’une extrême beauté, dépaysant qui dénonce avec finesse et justesse la place des femmes dans la société indienne à travers l’histoire de deux héroïnes courageuses, libres et ambitieuses. C’est un roman inoubliable.

Ici, on croit que quand la lune cache le soleil, les ténèbres peuvent se répandre dans notre monde. Mais ce n’est pas toujours au soleil de nous éclairer. Dans l’obscurité, nous devons chercher les étoiles, car leur éclat a un pouvoir spécial.

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