Jeunesse

Aristote et Dante plongent dans les eaux du monde • Benjamin Alire Saenz

Trois ans après avoir découvert Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers, je me suis plongée dans la suite parue au printemps.

Une histoire d’amour, d’une profondeur et d’une justesse bouleversantes ! Depuis qu’Ari a rencontré Dante, sa vie a basculé. Il ne cherche plus à se rendre invisible. Il ne fuit plus la compagnie des autres. Mais le souvenir de son frère emprisonné hante toujours ses nuits, son père est plus secret que jamais et l’avenir est une terrifiante page blanche. Surtout, il ne sait que faire de ce désir envahissant qui ne lui laisse aucun répit… Main dans la main, Aristote et Dante se tiennent prêts à affronter la violence d’un univers qui hait la différence.

Une suite à la hauteur de mon coup de cœur

C’est des années après sa sortie que j’ai découvert l’histoire d’Aristote et Dante, pour laquelle j’ai eu un immense coup de cœur. Comme je le disais dans ma chronique en 2019, ce roman fait partie de ceux qui marque de par leur caractère unique. A la façon d’une parenthèse, on a la sensation d’être entré dans une bulle le temps de quelques instants. Mon appréhension quant à lire la suite a vite été balayée par le sentiment de retrouver les mêmes émotions et la même impression. On retrouve Aristote et Dante exactement là où on les a laissés, tandis qu’ils se cherchent dans cette relation qui reste à approfondir, à construire avec les personnalités de chacun, les failles, les hauts et les bas et les nombreuses interrogations.

Personne n’a demandé à naître. Et personne ne veut mourir.
Tout comme nous ne décidons pas d’apparaître sur terre,
il ne nous appartient pas de choisir l’heure de notre départ.
Mais c’est ce que nous faisons entre le jour de notre naissance et celui de notre mort qui définit la valeur de notre vie.
Il nous faut faire des choix, et de ce choix forment les contours et le relief de notre existence. Nous sommes tous des cartographe, chacun d’entre nous. Nous voulons tous écrire nos noms sur la carte du monde.

Un point de vue exclusivement réservé à Aristote

Personnage parfois torturé, parfois invisibilisé par lui-même, Aristote a besoin de se construire personnellement en parallèle de sa relation et d’accepter l’idée de vivre avec son passé, avec ses démons. On sent à quel point sa personnalité évolue, donnant lieu à de nombreuses réflexions et des débats avec ses parents, avec Dante ou encore avec les amis qu’ils laissent enfin entrer dans sa sphère privée. Au milieu de son innocence naïve d’adolescent, à une époque où l’homosexualité est difficilement vivable au grand jour sous peine d’être condamnée, jugée ou encore sévèrement récriminée, on sent en lieu une impressionnante maturité, certes parfois fragile mais qui ne demande qu’à éclore. C’est également à travers son regard et à travers l’amour qu’il lui porte qu’on découvre Dante.

Il n’y avait plus un seul être humain dans tout l’univers, à l’exception du jeune homme dont je tenais la main, et toutes les formes de vie qui étaient jamais nées, et toutes les formes de vie qui étaient jamais mortes palpitaient à cet endroit où sa main touchait la mienne. Tout était là : le bleu du ciel, tous les langages de tous les peuples, et tous les cœurs brisés qui avaient appris à battre envers et contre tout.

Un aspect plus familial qui rend ce roman définitivement chaleureux et bienveillant

Si le premier tome était très axé sur Aristote et Dante, ce deuxième volet nous immerge davantage dans le domaine familial des deux garçons. Leurs parents sont plus présents, plus représenté et prennent véritablement part dans leur histoire et dans la construction de leur identité. Ils possèdent ce côté sage qui contrebalance avec l’énergie adolescente et viennent poser des mots plus doux sur des thématiques très fortes que l’auteur aborde, telles que le SIDA, le deuil, la mort, l’enfermement, le pardon, les non-dits. Tous ces sujets sont exprimés avec beaucoup de justesse et c’est ce qui rend ce roman aussi merveilleux à mes yeux. Il y a dans chaque phrase, dans chaque mot, une poésie et des mots finement choisis ainsi qu’une tendre philosophie qui berce et captive.

Il m’a embrassé et je l’ai embrassé à mon tour. Que l’univers nous voie. Que le ciel nous voie. Que les nuages qui défilent nous voient. Il m’a embrassé. Que les plantes du désert nous voient. Que les saules du désert, les montagnes au loin, les lézards, les serpents et les oiseaux du désert nous voient. Je l’ai embrassé Que le sable du désert nous voie. Que vienne la nuit ; que les étoiles puissent voir ces deux jeunes hommes qui s’embrassent.

Une nouvelle fois, Benjamin Alire Saenz réussit à entremêler poésie, philosophie et sujets très forts. Ce roman est une merveille, à la fois d’une extrême justesse et d’une incroyable beauté. L’histoire d’Aristote et Dante est, à mes yeux, inoubliable.

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